Construire une piscine en copropriété

En copropriété, les envies d'amélioration du cadre de vie peuvent parfois se heurter à des réalités complexes. C’est particulièrement vrai lorsqu’il s’agit de projets ambitieux, comme la construction d’une piscine. Synonyme de confort et d’agrément, une piscine peut incontestablement valoriser un immeuble, séduire les résidents et rehausser l’attractivité du bien. Mais en copropriété, un tel projet ne s’improvise pas : il soulève des questions juridiques, techniques, financières et de gouvernance. Quelles sont les règles à respecter ? Qui décide ? Comment répartir les coûts et gérer l’usage au quotidien ? Autant de points qu’il convient d’éclaircir avant de plonger dans les travaux.

Construire une piscine en copropriété
Construire une piscine en copropriété

Un projet soumis à un cadre juridique strict

Construire une piscine au sein d’une copropriété n’est pas une simple initiative individuelle, même si elle émane d’une majorité de copropriétaires. Ce type d’équipement relève d’un processus collectif qui doit respecter un cadre juridique rigoureux, au croisement du droit de la copropriété et de l’urbanisme.

 

Le premier point à examiner concerne la qualification du projet : s’agit-il d’un équipement collectif destiné à tous les résidents, ou d’une installation dont seul un copropriétaire ou un groupe restreint bénéficierait ? Cette distinction détermine les règles applicables et la nature des autorisations requises.

Ensuite, il faut consulter attentivement le règlement de copropriété. Ce document fondamental peut contenir des dispositions interdisant la construction de certaines installations ou imposant des conditions précises pour l’usage des parties communes. S’il n’interdit pas expressément la création d’une piscine, il peut toutefois prévoir des règles concernant l’aménagement de jardins, de toitures ou de cours intérieures.

 

La décision de construire une piscine doit être soumise au vote de l’assemblée générale. Selon les cas, différentes majorités s’appliquent :

  • La majorité absolue (article 25 de la loi du 10 juillet 1965) est requise s’il s’agit d’installer un équipement collectif impliquant une modification des parties communes.
  • Si la piscine entraîne une modification substantielle de la destination de l’immeuble ou touche à sa structure (par exemple, creuser dans une cour ou ajouter du poids en toiture), c’est la double majorité (article 26) qui peut être exigée.
  • En cas de simple adaptation technique ou si la dépense est faible, la majorité simple (article 24) peut suffire, mais ce scénario reste rare.

 

Au-delà des règles internes, il ne faut pas négliger les autorisations d’urbanisme. Une piscine enterrée ou hors-sol de taille significative peut nécessiter une déclaration préalable de travaux, voire un permis de construire selon la configuration du terrain et les règles locales du PLU (Plan local d’urbanisme).


Étude de faisabilité technique et architecturale

Même si le projet obtient un accord de principe des copropriétaires, encore faut-il qu’il soit techniquement réalisable. Une piscine représente une charge importante en poids et en contraintes structurelles. Il est donc indispensable de faire appel à un bureau d’études ou à un architecte pour évaluer la faisabilité technique du projet.

 

Si la piscine doit être implantée dans une cour intérieure, il faudra s’assurer que le sol peut être excavé sans compromettre les fondations de l’immeuble. S’il s’agit d’un toit-terrasse, les risques d’infiltration et la surcharge doivent être analysés avec rigueur. Dans les deux cas, des travaux d’étanchéité, de drainage et d’accès sécurisé seront inévitables.

 

Par ailleurs, les normes de sécurité sont particulièrement strictes. Les piscines collectives doivent respecter les règles d’accessibilité (notamment pour les personnes à mobilité réduite), prévoir des dispositifs de sécurité (barrières, alarmes ou couvertures) et permettre une surveillance aisée.

 

L’installation devra aussi s’intégrer harmonieusement dans l’environnement architectural de l’immeuble. Dans certaines zones classées ou en périmètre protégé, l’accord des Architectes des Bâtiments de France peut être exigé. Autant d’éléments qui peuvent rallonger les délais et alourdir les coûts.


Aspects financiers et répartition des charges

La piscine est souvent perçue comme un atout de confort et de valorisation pour l’immeuble. Mais cette plus-value a un coût qu’il faut évaluer et de répartir de façon équitable.

Évaluer le coût global du projet

Construire une piscine en copropriété ne se limite pas à creuser un bassin. Il faut compter :

  • le terrassement ou les aménagements structurels (si la piscine est installée sur un toit, une dalle ou une cour),
  • le coût de la piscine elle-même (coque, liner, système de filtration, chauffage éventuel),
  • les travaux de raccordement aux réseaux d’eau, d’électricité et d’évacuation,
  • les équipements de sécurité et d’accessibilité (barrières, alarmes, escaliers adaptés),
  • les aménagements extérieurs (plages, local technique, mobilier…),
  • les honoraires éventuels des maîtres d’œuvre ou bureaux d’études.

 

À cela s’ajoutent les frais annexes, souvent sous-estimés : démarches administratives, assurances chantier, taxes locales éventuelles, ou encore diagnostics techniques. En moyenne, il faut prévoir entre 30 000 et 100 000 euros, selon la nature et la taille du projet.

Financement du projet : quelles options pour la copropriété ?

Une fois le coût estimé, la copropriété doit définir le mode de financement :

  • Par un appel de fonds exceptionnel, réparti entre tous les copropriétaires selon leurs tantièmes. Ce choix suppose que chacun puisse régler la somme demandée dans un délai raisonnable, ce qui peut créer des tensions si certains copropriétaires sont en difficulté financière.
  • Par un emprunt collectif souscrit par le syndicat des copropriétaires. Ce mode de financement permet d’étaler la charge sur plusieurs années et de lisser l’effort financier. Toutefois, il nécessite un vote spécifique en assemblée générale (article 26 de la loi de 1965) et l’engagement du syndic à gérer le remboursement et les échéances.

Répartition des charges : une question sensible

Qui doit payer, et selon quels critères ? Cette question est au cœur des débats lorsqu’il s’agit d’un équipement collectif qui n’est pas nécessairement utilisé par tous.

 

En principe, si la piscine est considérée comme un équipement commun, les charges associées (construction, entretien, assurances, gestion) sont réparties en fonction des tantièmes généraux de chaque lot, comme pour les escaliers ou l’ascenseur. Cela signifie que même un copropriétaire situé dans un bâtiment éloigné de la piscine ou n’en faisant jamais usage y contribue.

 

Toutefois, l’article 10 de la loi de 1965 autorise une répartition différenciée des charges si une partie des copropriétaires est seule concernée par l’usage de l’équipement. Il est alors possible de créer une "partie commune à jouissance spéciale" ou un groupe de charges spécifique, à condition que cela soit inscrit dans le règlement de copropriété ou décidé en assemblée à la double majorité.

Une telle modification suppose une analyse juridique approfondie et, bien souvent, une modification du règlement de copropriété, ce qui requiert un vote à la majorité de l’article 26. Elle peut aussi entraîner un refus de certains copropriétaires qui s’estimeraient lésés, ou à l’inverse qui souhaitent participer à l’investissement pour valoriser leur bien.

Anticiper les coûts d’entretien et les charges récurrentes

Construire une piscine, c’est aussi s’engager dans le temps. Il faut prévoir des charges d’exploitation annuelles :

  • produits de traitement de l’eau,
  • consommation d’eau et d’électricité,
  • prestations d’entretien,
  • contrôles techniques,
  • réparations.

Selon la taille du bassin et la fréquence d’utilisation, ces coûts peuvent représenter plusieurs milliers d’euros par an.

 

Ces dépenses doivent être intégrées au budget prévisionnel de la copropriété, sous une ligne spécifique. Comme pour les charges de chauffage collectif ou d’ascenseur, elles peuvent faire l’objet d’un suivi en assemblée générale, avec un bilan annuel.

 

Pour faire face à d’éventuelles réparations lourdes (liner à changer, pompe défaillante, infiltration…), il est conseillé de constituer un fonds de réserve spécifique à la piscine, alimenté progressivement. Cela permet d’éviter un nouvel appel de fonds brutal à la moindre panne.

Usage, gestion et entretien de la piscine

Une fois la piscine construite, encore faut-il l’utiliser dans des conditions satisfaisantes pour tous. Cela passe par l’adoption d’un règlement d’usage, adopté en assemblée générale, qui fixe les plages horaires d’ouverture, les conditions d’accès (badges, codes, clé), les interdictions (animaux, musique, repas au bord du bassin) et les éventuelles règles de réservation.

 

Une piscine, même utilisée de façon saisonnière, nécessite un entretien régulier, rigoureux et conforme aux normes sanitaires. Cela inclut :

 

  • Le nettoyage des surfaces (fond, parois, margelles)
  • Le contrôle du pH et du taux de chlore ou de sel
  • Le bon fonctionnement des pompes, filtres et éventuels systèmes de chauffage
  • L’hivernage et la remise en service

 

La copropriété peut confier cette mission à un prestataire spécialisé, souvent via un contrat annuel. Certains gardiens peuvent également s’en charger, à condition que cela soit compatible avec leurs autres missions. L’intervention de professionnels reste cependant préférable pour garantir la conformité avec les règles d’hygiène, notamment en cas de contrôle des autorités sanitaires.

Responsabilités juridiques

L’existence d’une piscine en copropriété engage la responsabilité du syndicat des copropriétaires, au même titre que celle du syndic, qui en assure la gestion administrative. En cas d’accident, de blessure ou de problème sanitaire, c’est la copropriété dans son ensemble qui peut être tenue pour responsable.

 

Il est donc impératif de :

  • Souscrire une assurance adaptée, couvrant les dommages corporels et matériels liés à l’usage de la piscine.
  • Respecter les normes de sécurité obligatoires, notamment en matière de protection contre les noyades : barrières d’accès, couverture homologuée, alarme sonore ou immersion, selon les cas. Même si certaines obligations s’appliquent d’abord aux piscines privées, les installations collectives doivent en respecter l’esprit, voire aller au-delà pour éviter tout risque.

 

La copropriété doit aussi veiller à la surveillance des comportements dans l’enceinte de la piscine : nuisance sonore, consommation d’alcool, incivilités… Le règlement intérieur peut prévoir des sanctions progressives (avertissement, suspension temporaire d’accès), à condition que les modalités de contrôle soient claires et respectueuses des droits individuels.

 

La gestion de la piscine, au quotidien, peut faire l’objet d’une délégation à un comité, composé de copropriétaires volontaires, chargé de veiller à la bonne application du règlement et de faire remonter les dysfonctionnements au syndic.

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