Comprendre l'autoconsommation électrique
L’autoconsommation consiste à produire de l’électricité pour ses propres besoins à partir d’une installation locale, le plus souvent des panneaux solaires photovoltaïques. Cette énergie peut être consommée immédiatement sur place ou, si elle n’est pas entièrement utilisée, injectée dans le réseau public. L’objectif est de réduire sa dépendance aux fournisseurs d’énergie traditionnels et de maîtriser ses dépenses.
On distingue deux formes principales :
- l’autoconsommation individuelle
- l’autoconsommation collective.
La première concerne un seul consommateur qui produit et consomme sa propre électricité, par exemple un logement individuel équipé de panneaux solaires en toiture.
La seconde, plus récente, permet à plusieurs consommateurs, situés à proximité les uns des autres (dans un rayon de deux kilomètres), de se partager l’énergie produite par une installation unique. Ce modèle ouvre la voie à des projets énergétiques à l’échelle d’un immeuble ou d’un quartier.
L’intérêt pour l’autoconsommation s’explique par une conjonction de facteurs :
- la volonté d’agir en faveur de l’environnement,
- la recherche d’économies sur la facture énergétique,
- la possibilité pour certains copropriétaires, de valoriser leur bien immobilier.
C’est aussi un levier de résilience dans un contexte de hausse du coût de l’électricité et d’incertitudes géopolitiques sur les approvisionnements.
Mais si les avantages sont nombreux, l’autoconsommation implique une bonne compréhension de son fonctionnement et de son cadre réglementaire, particulièrement dans un contexte collectif comme la copropriété. La suite de l’article vous propose un tour d’horizon des règles, des méthodes et des bonnes pratiques pour engager ce type de démarche dans les meilleures conditions.
Le cadre juridique de l'autoconsommation en France
L’autoconsommation électrique bénéficie aujourd’hui d’un cadre légal clairement défini, qui a connu d’importantes évolutions ces dernières années. C’est notamment la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte (août 2015) qui a posé les premières bases de l’autoconsommation collective. Depuis, d’autres textes comme la loi Énergie-Climat de 2019 et plusieurs ordonnances gouvernementales sont venus préciser les conditions de mise en œuvre.
Le principe fondamental est simple : tout producteur d’électricité peut consommer, en tout ou en partie, sa propre production. Ce droit est encadré par l’article L315-1 du Code de l’énergie, qui distingue deux régimes : l’autoconsommation individuelle et l’autoconsommation collective organisée.
Dans le cas d’un projet collectif, typiquement en copropriété, la loi impose la création d’une personne morale organisatrice (PMO). Cette structure juridique, qui peut être une association ou une société, est chargée de répartir l’énergie produite entre les participants, appelés « autoconsommateurs », selon une clé de répartition déclarée à Enedis. Cette répartition doit être équitable et refléter les besoins réels ou choisis des utilisateurs. À noter que les logements doivent être situés dans un rayon de 2 km autour du site de production, et être raccordés au réseau basse tension.
L'opérateur de réseau, Enedis, joue un rôle central dans ce dispositif : il assure la gestion des flux électriques, la vérification des répartitions et la mise en œuvre du contrat d’autoconsommation collective. Il facture également des tarifs d’utilisation du réseau public d’électricité (TURPE), réduits dans le cas de projets en autoconsommation.
Enfin, il convient de préciser que le vote de l’assemblée générale est indispensable pour engager un projet d’autoconsommation en copropriété. La décision nécessite en général une majorité absolue (article 25 de la loi du 10 juillet 1965), mais des règles spécifiques peuvent s’appliquer selon l’ampleur des travaux ou la nature de la personne morale organisatrice.
Ce cadre juridique, bien que désormais stabilisé, reste technique et impose une bonne anticipation des aspects réglementaires. Il est donc recommandé de s’entourer de conseils spécialisés dès les premières étapes du projet.
Mettre en place un projet d’autoconsommation en copropriété
Lancer un projet d’autoconsommation dans une copropriété demande une organisation rigoureuse. C’est un investissement collectif qui touche à la fois des aspects techniques, juridiques et économiques.
Faisabilité du projet
La première étape consiste à évaluer la faisabilité du projet.
Plusieurs critères doivent être étudiés :
- l’orientation et l’inclinaison de la toiture,
- la surface disponible pour installer les panneaux,
- la consommation électrique des parties communes (ascenseur, éclairage, ventilation, etc.),
- la volonté éventuelle de certains copropriétaires de participer à titre individuel.
Une étude technique préalable, réalisée par un bureau d’études ou un installateur certifié, permet de déterminer la puissance optimale de l’installation, d’estimer la production attendue et de simuler les gains potentiels. Elle constitue également un support de communication utile en amont de l’assemblée générale.
Les démarches et l’encadrement de l’installation
Toute installation photovoltaïque sur les parties communes doit être soumise au vote des copropriétaires. Ce type de travaux est considéré comme une modification de l’usage des parties communes, et relève donc de la majorité de l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965. En cas d’échec du premier vote, un second vote à la majorité simple peut être organisé selon l’article 25-1. Une préparation rigoureuse en amont de l’AG est donc essentielle.
L’installation est ensuite confiée à un professionnel disposant de la certification QualiPV, gage de qualité et de conformité aux normes en vigueur. L’entreprise assure :
- la pose des panneaux,
- le raccordement au réseau,
- la mise en service de l’installation,
- et parfois le suivi de performance et la maintenance.
L’utilisation post-installation
Une fois l’installation en fonctionnement, la production électrique peut être utilisée localement. Si elle n’est pas entièrement consommée sur place, le surplus est injecté dans le réseau.
Trois modèles économiques sont alors envisageables :
- Autoconsommation totale : l’ensemble de l’énergie est utilisé dans la copropriété. Le surplus peut être stocké à l’aide de batteries.
- Autoconsommation avec vente du surplus : l’électricité non consommée est revendue à un fournisseur, à un tarif réglementé ou négocié.
- Tiers-investissement : une société extérieure finance et exploite l’installation, en contrepartie d’un loyer ou d’un partage des bénéfices.
Enfin, pour garantir la réussite du projet dans la durée, il est indispensable de prévoir une gestion continue de l’installation :
- maintenance des équipements,
- contrôle de la production,
- adaptation des répartitions d’énergie si nécessaire.
Une convention ou un règlement spécifique, validé par l’assemblée générale, peut encadrer ces aspects de façon claire et pérenne.
Les avantages et les limites de l’autoconsommation en copropriété
L’autoconsommation électrique en copropriété présente de nombreux atouts, tant sur le plan économique qu’environnemental. Toutefois, elle comporte aussi certaines contraintes qu’il est important d’anticiper avant de se lancer.
Parmi les principaux avantages, on peut citer :
- La réduction des charges communes : en alimentant les équipements collectifs (éclairage, ventilation, ascenseurs, etc.) avec de l’électricité produite sur place, la copropriété diminue sa facture énergétique, ce qui se traduit par des charges moins élevées pour les résidents.
- La valorisation du patrimoine immobilier : un immeuble équipé en panneaux photovoltaïques gagne en attractivité, notamment auprès d’acheteurs ou de locataires sensibles aux questions environnementales.
- L’indépendance énergétique partielle : produire une part de sa propre électricité permet de se prémunir, en partie, contre la volatilité des prix de l’énergie.
- La contribution à la transition écologique : en utilisant une énergie renouvelable et locale, la copropriété participe activement à la réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Mais ces bénéfices doivent être mis en balance avec certaines limites ou défis :
- Le coût initial de l’installation : bien que les prix des équipements aient baissé, l’investissement de départ reste conséquent. Il peut néanmoins être atténué par des aides publiques (nous y reviendrons dans la prochaine partie).
- La complexité technique et juridique : la gestion d’un projet collectif implique une coordination entre copropriétaires, un suivi administratif rigoureux et le respect d’un cadre légal spécifique.
- La variabilité de la production : comme toute source d’énergie renouvelable, le solaire est soumis aux aléas climatiques. La production peut donc fluctuer d’un mois à l’autre.
- La répartition de l’énergie : dans le cadre de l’autoconsommation collective, la distribution de l’électricité entre les participants doit être définie en amont et peut évoluer avec le temps. Cela suppose une gestion transparente et parfois des ajustements.
En somme, l’autoconsommation en copropriété offre une opportunité réelle d’économie et d’engagement environnemental, à condition d’être bien préparée, bien encadrée et collectivement portée.
Conseils pratiques pour un projet réussi
Pour qu’un projet d’autoconsommation en copropriété se déroule dans les meilleures conditions, quelques bonnes pratiques peuvent faire la différence dès les premières étapes.
- S’appuyer sur une dynamique collective
Un projet d’autoconsommation fonctionne d’autant mieux qu’il est porté par un groupe de copropriétaires engagés. Il est donc utile de constituer un comité de pilotage informel, ou de s’appuyer sur le conseil syndical, afin de porter la réflexion et de relayer l’information auprès des autres résidents. La clarté du projet et la transparence des échanges sont des leviers décisifs d’adhésion.
- Se faire accompagner par des professionnels
L’autoconsommation collective est un domaine technique. Faire appel à des bureaux d’études spécialisés, installateurs certifiés permet d’éviter des erreurs de conception, d’optimiser le dimensionnement de l’installation, et de sécuriser les aspects contractuels. Certains accompagnateurs de projets proposent des offres clé en main spécialement conçues pour les copropriétés.
- Anticiper les coûts et rechercher des financements
Même si l’investissement est souvent rentabilisé à moyen terme, le coût initial peut freiner certains copropriétaires. Il est donc judicieux d’identifier les aides financières disponibles, comme :
- la prime à l’autoconsommation (versée sur 5 ans),
- les aides locales (régions, métropoles, communes),
- le taux réduit de TVA sur certains travaux énergétiques,
- et, dans certains cas, des subventions via les certificats d’économie d’énergie (CEE).
Un plan de financement détaillé, présenté en AG, renforce la crédibilité du projet.
- Choisir un modèle de gouvernance adapté
Dans le cadre de l’autoconsommation collective, la création d’une personne morale organisatrice (PMO) est obligatoire. Cette structure (souvent une association) gère la répartition de l’énergie entre les participants. Il est important de définir clairement :
- les règles de participation (qui consomme quoi, et dans quelles proportions),
- les responsabilités de chacun,
- et les modalités d’évolution du projet dans le temps (arrivée ou départ de participants, extension de l’installation…).
- Suivre et entretenir l’installation
Enfin, la réussite du projet passe par un suivi régulier de la production. De nombreux outils permettent aujourd’hui de visualiser en temps réel la quantité d’énergie produite et consommée. Il est aussi essentiel de prévoir un entretien périodique des équipements (nettoyage, vérification des branchements, etc.) pour garantir leur bon fonctionnement sur le long terme.